Danse !

J’ai été danseuse.

Je ne me rappelle plus exactement comment j’ai décidé de l’être, mais je me revois ce premier jour, terrifiée et fascinée par les immenses miroirs et le parquet ciré qui m’attendaient, petite souris dans son justaucorps bleu.

La danse classique est une discipline stricte et exigeante.
Je ne me souviens pas  d’avoir été particulièrement douée, moi qui étais déjà un peu trop grande, un peu trop maladroite.
Mais j’étais gracieuse et souriante.
De toutes ces heures de travail acharné, je ne garde que le souvenir de la beauté du geste, des courbes arrondies, des muscles tendus, la respiration rythmée sur la musique.
Le souffle suspendu des spectateurs, leurs yeux écarquillés, les frissons dans la nuque.
Le chuchotement des danseurs, le bruissement du tulle des costumes, les maquillages multicolores, le raclement des chaussons sur le sol, l’odeur de la colophane.
Mon petit buste et mes longues jambes de sauterelles dans un tutu blanc vaporeux.

J’ai arrêtée au bout de 14 ans, lorsque je suis partie étudier à la fac.
C’était devenu trop prenant, trop exigeant.
J’avais soif d’autre chose.
Aujourd’hui, je ne fais plus de classiques, j’ai rangé mes pointes et mes tutus, mais je danse toujours.

« Danse tant que tu peux danser sur les paves, sur l’herbe,
Sur une table de bistrot, a l’ombre des tavernes.
Viens, laisse-toi porter par toutes les musiques
Qui sortent d’un piano ou d’un vieux tourne-disque.
Danse pour retrouver l’amour et la folie,
Danse pour éblouir ton âme qui s’ennuie.

Et tu verras jaillir les sources souterraines,
Et les torrents de joie qui coulent dans tes veines.

Danse tant que tu peux danser, danse autour de la terre,
Danse pour qu’un printemps nouveau balaye les hivers.
Danse comme l’on vit, danse comme l’on aime,
Danse comme on écrit sur les murs un poème.

Georges Moustaki (extraits)

 Emmenez-moi danser, emmenez moi m’émerveiller.

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